Cet employé subalterne de la Garde nationale aérienne, « a été interpellé sans incident » jeudi à Dighton, une petite ville rurale au sud de Boston, dans l’État du Massachusetts (nord-est), selon le ministre de la Justice Merrick Garland. Son arrestation a été retransmise en direct par les chaînes de télévision américaines.

Il est soupçonné d’avoir constitué un risque « très grave » pour la sécurité nationale des Etats-Unis, selon le Pentagone, en divulguant en ligne des documents confidentiels sur la guerre en Ukraine et qui suggèrent aussi que Washington collecte des renseignements sur ses proches alliés, notamment Israël et la Corée du Sud. Une affaire des plus embarrassantes pour le gouvernement du président Joe Biden.

Le jeune homme pourrait comparaître vendredi devant un tribunal du Massachusetts, selon une source au sein du ministère de la Justice.

Les télévisions ont diffusé jeudi en boucle des images aériennes montrant son arrestation. On pouvait y voir un homme, mains sur la tête et portant un t-shirt gris et un short rouge, reculer lentement vers des agents armés et en tenue de camouflage avant d’être interpellé puis escorté vers un véhicule.

Biden « préoccupé »

Le président américain Joe Biden, en visite en Irlande, a été tenu informé de l’arrestation, selon la Maison Blanche. « Je suis préoccupé que ce soit arrivé », avait-il dit plus tôt.

Le ministère américain de la Justice a ouvert une enquête pénale après la fuite des documents.

Le Washington Post avait rapporté mercredi que la fuite était l’oeuvre d’un jeune homme ayant travaillé sur une base militaire, qui a partagé ses informations sur un groupe privé en ligne du réseau social Discord. Sous le pseudonyme « OG », le suspect aurait publié pendant des mois des documents issus de la base militaire où il travaille.

La Garde nationale a indiqué que Jack Teixeira s’était engagé en septembre 2019, travaillait en tant que spécialiste informatique et communications et avait atteint le rang d’aviateur de première classe, le troisième le plus bas de la hiérarchie.

« OG » avait demandé aux autres membres du groupe Discord de ne pas diffuser les documents, assurant qu’il n’avait pas l’intention d’être un lanceur d’alerte, selon le Washington Post. Il se montrait critique envers l’Etat — dont il dénonçait « l’abus de pouvoir » –, les forces de l’ordre et la communauté du renseignement.

Le groupe, composé d’environ 24 personnes dont certaines originaires de Russie et d’Ukraine, s’est formé dès 2020 autour de leur passion mutuelle pour les armes à feu, le matériel militaire et la religion.

La porte-parole de la Maison Blanche, Karine Jean-Pierre, a déclaré que les Etats-Unis examinaient les « implications » de cette fuite « pour la sécurité nationale ».

Le Pentagone a également décidé de restreindre davantage l’accès à ce type d’informations sensibles, a déclaré Mme Jean-Pierre à la presse.

La porte-parole a ajouté que le gouvernement américain souhaitait que les réseaux sociaux « évitent de faciliter » la distribution de tels documents confidentiels, estimant qu’ils avaient « une responsabilité envers leurs utilisateurs et le pays ».

« Risque très grave »

Un porte-parole de Discord a affirmé que la sécurité de ses utilisateurs était la priorité de la plateforme, assurant coopérer avec les forces de l’ordre.

Le fait que ces documents circulent en ligne représente « un risque très grave pour la sécurité nationale et peut potentiellement alimenter la désinformation », avait indiqué lundi un porte-parole du ministère américain de la Défense, Chris Meagher.

Le ministre de la Défense Lloyd Austin a salué jeudi dans un communiqué l' »arrestation rapide » du suspect, ajoutant qu’il avait ordonné un « audit des accès à notre renseignement (…) et des procédures de contrôle au sein du ministère pour mieux orienter nos efforts visant à éviter que ce genre d’incident ne se reproduise ».

Les documents mis en ligne révèlent notamment les inquiétudes des services de renseignement américains quant à la viabilité d’une contre-offensive ukrainienne contre les forces russes.

Un document examiné par l’AFP fait aussi état des préoccupations des Etats-Unis à propos de la capacité de l’Ukraine à continuer à se défendre contre les frappes russes.

Des dizaines de photos de ces documents ont été relayées sur Discord, mais aussi Twitter et Telegram, certains ayant sans doute circulé depuis des semaines, sinon des mois, avant d’attirer l’attention de la presse.

Les autorités américaines n’ont toutefois pas publiquement confirmé l’authenticité de ces documents publiés en ligne, et elle n’a pas encore été vérifiée de manière indépendante.

Beaucoup de ces documents ne sont plus disponibles sur les sites où ils sont initialement apparus.

AFP