AA / Ankara / Sumeyye Dilara Dincer – Can Efesoy – Muhammet Tarhan
Hakan Fidan, ministre turc des Affaires étrangères, a écrit un article pour le magazine Insight Turkey, publié par le groupe de réflexion SETA, où il explique la vision de la politique étrangère de la Türkiye.
Dans son article, Fidan définit la Türkiye comme un « acteur qui configure la région et change le système ».
« Je suis devenu ministre des Affaires étrangères lorsque nous sommes entrés dans le « siècle de la Türkiye ». La vision du « siècle de la Türkiye », proposé par le président Recep Tayyip Erdogan, vise à guider la Türkiye vers un avenir caractérisé par le progrès, le développement et l’engagement mondial, et à faire revivre les acquis du siècle dernier de manière vigoureuse et enthousiaste », a-t-il noté.
Dans les premiers paragraphes de son article, Fidan explique que le système mis en place après la Seconde Guerre mondiale n’est plus suffisant pour assurer la paix et la sécurité, et que même le Secrétaire général des Nations Unies (ONU), Antonio Guterres, convient de ce fait. Il fait référence aux appels de la Türkiye selon lesquels « Le monde est plus grand que 5 pays ».
« Notre appel arrive à un moment où la concurrence entre les grandes puissances intensifie les tensions mondiales. Il est possible de voir les effets de ces conflits partout dans le monde. Il est nécessaire de garantir que les principes fondamentaux du droit international soient protégés. Or, le Conseil de sécurité de l’ONU, qui est principalement responsable du maintien de la paix et de la sécurité internationales, ne remplit pas cette mission. Ainsi, cela conduit à une détérioration progressive de l’équilibre du système international, à des évolutions imprévues et à davantage de vulnérabilités », a-t-il ajouté.
Et Fidan de poursuivre dans l’article, initialement rédigé en anglais et intitulé « Turkish Foreign Policy at the Turn of the ‘Century of Türkiye’: Challenges, Vision, Objectives, and Transformation » :
« Alors que la communauté internationale est préoccupée par la guerre russo-ukrainienne, elle est également aux prises avec les conséquences de celle-ci, telles que l’inflation mondiale, la récession économique, la crise énergétique et l’insécurité alimentaire. Les organisations qui devront proposer des solutions semblent incapables de faire face à cette crise qui a éclaté au cœur de l’Europe mais qui secoue le monde entier. (….) Ainsi, le monde traverse une période complexe de crises multiples qui soulignent à la fois la nécessité urgente et le caractère inévitable du changement. Il est désormais évident que le système international doit subir une transformation significative. »
– La vision 2023 de la Türkiye
Hakan Fidan, qui résume ainsi les problèmes du système international, évoque également les propositions et la vision de la Türkiye et déclare que cette dernière sera l’un des fondateurs du nouvel ordre mondial.
– Principaux objectifs de la politique étrangère turque
Le chef de la Diplomatie turque a par la suite souligné le premier objectif de la politique étrangère turque est d’assurer la paix et la sécurité dans la région.
« Le terrorisme constitue la menace la plus grave à la paix et à la sécurité régionales. Bien qu’il constitue un crime contre l’humanité, il continue d’être instrumentalisé comme un outil pour les guerres par procuration en Syrie, en Afrique du Nord, au Sahel et ailleurs. Il est essentiel de régulièrement souligner la nécessité d’une coopération internationale efficace et authentique dans la lutte contre ce fléau.
« Nous sommes le seul allié de l’OTAN sur le terrain dans la lutte contre les organisations terroristes armées Daech, FETO et PKK/YPG, qui menace non seulement les innocents mais aussi la souveraineté et l’intégrité territoriale de nos voisins. Nous restons attachés à cette lutte et continuerons de jouer un rôle de premier plan dans les initiatives internationales dans ce domaine. Toutefois, notre détermination n’absout nullement les autres de leurs responsabilités », a-t-il noté.
– Politique irakienne et syrienne
Déclarant que la Türkiye respecte l’intégrité territoriale et l’unité politique de la Syrie, le ministre turc souhaite que la feuille de route énoncée dans la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies soit mise en œuvre et que l’opposition syrienne légitime soit incluse dans le processus politique.
Selon Fidan, « les progrès dans ce processus pourraient également faciliter le retour sûr, volontaire et digne des Syriens dans leurs foyers. Grâce aux initiatives de la Türkiye, des centaines de milliers de Syriens ont pu rentrer chez eux. »
D’autre part, Fidan a expliqué que la Türkiye est également le principal défenseur de l’intégrité territoriale et de la stabilité politique de l’Irak. Il a indiqué que les initiatives visant à éliminer les groupes terroristes dans ce pays, notamment la lutte contre le PKK, continueront à être soutenues avec détermination.
– « La poursuite des relations entre l’Iran et l’Arabie Saoudite a été un tournant »
Dans son article, Fidan a également indiqué que « la reprise des relations diplomatiques entre l’Iran et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en termes de tendances à la réconciliation et à la normalisation dans la région. »
Fidan a déclaré que le problème palestino-israélien doit être résolu pour une solution permanente au Moyen-Orient, ajoutant que Jérusalem-Est est la capitale de la Palestine.
– Retour à l’Initiative de l’accord céréalier de la mer Noire
Le chef de la Diplomatie turque évoque en outre la sécurité européenne et la guerre russo-ukrainienne.
« Le problème important à surmonter pour la sécurité européenne et mondiale est la guerre en cours entre la Russie et l’Ukraine. Les conséquences néfastes de cette guerre affectent non seulement les parties belligérantes, mais ont également des répercussions mondiales », a-t-il dit.
Fidan explique que la Türkiye souhaite jouer un rôle constructif avec les deux parties depuis le début de la guerre et qu’elle va accroître ses efforts. Il affirme que son pays s’efforce de revitaliser l’accord céréalier de la mer Noire.
– Relations avec l’Arménie et l’Azerbaïdjan
Fidan a fait savoir que la Türkiye a soutenu le processus de négociation entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie dès le début.
« La Türkiye a lancé un processus visant à établir des relations de bon voisinage et une normalisation complète avec l’Arménie. En même temps, elle approfondit ses relations avec l’Azerbaïdjan dans tous les domaines, selon la Déclaration de Choucha signée par les deux présidents en juin 2021. »
« Nous espérons que l’Arménie profitera pleinement de cette opportunité historique et qu’en conséquence, une nouvelle page de paix, de prospérité et de coopération s’ouvrira dans la région », a-t-il ajouté.
– Relations avec la Grèce et Chypre
Décrivant les efforts de la Türkiye en faveur de la paix et de la stabilité dans les Balkans, Fidan affirme qu’un modèle « gagnant-gagnant-gagnant » est possible.
« Nos relations avec la Grèce ne font pas exception. L’atmosphère positive actuelle offre une précieuse opportunité de trouver des solutions aux questions controversées et d’explorer des voies de coopération. Il existe un grand potentiel entre la Türkiye et la Grèce dans différents domaines allant de l’économie et du commerce aux relations entre les peuples, en passant par la protection civile et les efforts de secours. La Türkiye est sincère dans cet effort, à condition que la Grèce réponde avec la même sincérité, sans compromettre ses droits et intérêts légitimes. De cette manière, nous pouvons renforcer la confiance mutuelle et transformer le climat politique positif actuel en un climat durable. »
Un autre développement en Méditerranée sera le règlement du problème chypriote après 60 ans à travers la reconnaissance des droits naturels, de l’égalité souveraine et du statut international égal des Chypriotes turcs et la reconnaissance de l’indépendance de la République turque de Chypre du Nord (RTCN).
– Institutionnalisation des relations extérieures
Faisant référence à l’objectif d’institutionnaliser davantage la politique étrangère, Fidan a souligné qu’il s’agit d’un double objectif : renforcer les relations stratégiques existantes et d’en établir de nouvelles.
Fidan a expliqué qu’en tant qu’allié de l’OTAN, la Türkiye entretient un partenariat stratégique avec les États-Unis. Dans la période à venir, la Türkiye s’efforcera de renforcer sa coopération avec les États-Unis dans de nombreux domaines et sur la base d’intérêts communs. Cela est essentiel pour établir la paix et la sécurité chez les pays voisins et dans d’autres pays.
Dans l’article, il est également indiqué que les relations transatlantiques de la Türkiye sont d’une importance vitale pour la sécurité et la prospérité de l’Europe et qu’en tant que membre de l’OTAN, la Türkiye contribue fondamentalement au principe de l’indivisibilité de la sécurité.
– Améliorer l’environnement de protection sociale
Dans son article, le ministre turc décrit « la création d’un environnement de prospérité » comme le troisième objectif de la politique étrangère turque.
Fidan affirme qu’une attention particulière sera accordée à l’aspect économique de la politique étrangère dans la période à venir pour une « économie turque forte et autonome ».
« Conformément à son objectif de devenir l’une des dix plus grandes économies du monde, la Türkiye approfondira ses relations commerciales et économiques avec tous les pays du monde. Dans ce cadre, le domaine de la technologie, notamment l’industrie de défense, sera prioritaire. Ainsi, nous pouvons réduire les tensions, désamorcer les conflits, soutenir les efforts de lutte contre le terrorisme et permettre la stabilité régionale », a-t-il poursuivi.
– Transformation du ministère des Affaires étrangères
Enfin, Hakan Fidan a noté que tout ce travail nécessite une adaptation constante.
« La transformation organisationnelle et d’autres études en cours au ministère des Affaires étrangères reflètent l’adoption d’une approche proactive en tant qu’institution intelligente. Malgré ces changements, le ministère reste fidèle au savoir accumulé au fil des siècles », a-t-il conclu.
