Hakim Ziyech, Thomas Maddens

Comptes suspendus, contenu bloqué, jeux d’algorithme, des internautes dénoncent la censure dont ils se disent victimes des plus grandes plateformes de réseaux sociaux, qui réduisent la portée des contenus critiques à l’égard d’Israël.

Plusieurs internautes, y compris des personnalités du monde du sport, du cinéma et du journalisme suivis par des millions de personnes, ont fait état d’une censure de contenus sur les réseaux sociaux.

La semaine dernière, le footballeur international marocain, Hakim Ziyech, qui joue aujourd’hui en Turquie au club stambouliote de Galatasaray, a partagé le message suivant:

« Les joueurs de l’équipe nationale marocaine Aboukhlal, Ziyech, Mazraoui et Sabiri ont tous posté des stories en soutien à la Palestine, mais vous ne pouvez les voir que si vous allez sur leur profil, ils essaient de nous faire taire, c’est littéralement nous contre le MONDE entier !»

Le message de l’international marocain Hakim Ziyech sur Instagram
(Others)

De la même manière, Thomas Maddens, un cinéaste et militant basé en Belgique, a remarqué qu’une vidéo sur la Palestine qu’il avait postée sur TikTok avec le mot « génocide » a soudainement cessé de susciter de l’engagement sur la plateforme après un pic initial.

Des auteurs, des militants, des journalistes, des cinéastes et des utilisateurs du monde entier ont déclaré que les messages contenant des hashtags tels que « FreePalestine » et « IStandWithPalestine », ainsi que les messages exprimant un soutien aux Palestiniens civils tués par les forces israéliennes, sont censurés par les plateformes.

Certains utilisateurs accusent également Instagram, de supprimer arbitrairement les posts qui mentionnent tout simplement le mot “Palestine” pour violation des « directives communautaires », pendant que d’autres affirment que leurs stories Instagram avaient été censurées après avoir partagé des informations sur des manifestations de soutien à la Palestine.

Une influenceuse française suivie par des centaines de milliers de personnes, qui faisait en moyenne 10.000 vues par storie, a vu ses chiffres vertigineusement chuter lorsqu’elle a partagé une nouvelle storie en soutien à la Palestine.

« Après avoir publié une storie sur Instagram à propos de la guerre à Gaza hier, mon compte a été banni. De nombreux collègues et amis journalistes ont signalé la même chose. C’est une menace extraordinaire pour la circulation de l’information et le journalisme crédible sur une guerre sans précédent », a posté sur X la journaliste Azmat Khan, lauréate du prix Pulitzer.

La forme de censure la plus importante qui est mise en œuvre concerne tout compte mentionnant des mots-clés tels que « Palestine », « Gaza », « Hamas », voire « Al Quds » et « Jérusalem » dans les stories et les posts Instagram, aux côtés de hashtags tels que #FreePalestine, et #IStandWithPalestine ».

Dans un post sur X le 15 octobre, le porte-parole de Meta, Andy Stone, a attribué la réduction de la portée des posts à un “bug”.

« Ce bug a affecté des comptes dans le monde entier et n’a rien à voir avec le sujet du contenu – et nous l’avons corrigé aussi vite que possible », a-t-il annoncé.

Interrogé sur les accusations de shadowbanning, M. Stone a renvoyé les internautes à un article de blog publié par Meta, qui mettait en avant ses derniers efforts pour lutter contre la désinformation liée à la guerre à Gaza. Ce billet précise que les utilisateurs qui ne sont pas d’accord avec les décisions de modération de l’entreprise peuvent faire appel.

Les internautes ont rapporté que le même problème de censure et de réduction d’engagements se rencontrait également sur TikTok.

Quelques jours après la première attaque du Hamas contre Israël, Mondoweiss, un média pro-palestinien basé aux États-Unis, a déclaré que TikTok avait interdit son compte et ne l’avait rétabli que quelques heures plus tard après un tollé en ligne. Le Quds News Network, basé en Palestine, a publié sur X que sa page Facebook avait été suspendue par Meta.

L’entreprise chinoise a quant à elle affirmé qu’elle « ne modère ni ne supprime de contenu en fonction de sensibilités politiques », ajoutant que la plateforme supprime « le contenu qui viole les lignes directrices de la communauté, qui s’appliquent de la même manière à tout le contenu sur TikTok ».

Cependant, les groupes de défense des droits civiques ne croient pas aux dénégations des plateformes.

En 2021, lors d’affrontements entre Israéliens et Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie, l’ONG Human Rights Watch, avait déjà accusé Facebook de supprimer des contenus pro-palestiniens, fustigeant une “restriction de la liberté d’expression”.

“Terroriste”

Certains utilisateurs se sont également plaints de l’apparition du mot « terroriste » près de leur biographie Instagram.

Meta s’est excusée d’avoir ajouté le mot « terroriste » aux comptes pro-palestiniens, déclarant que le problème qui avait « brièvement causé des traductions arabes inappropriées » avait été résolu.

Ce mois-ci, 48 organisations, dont 7amleh, le Centre arabe pour l’avancement des réseaux sociaux, qui défend les droits numériques de la société civile palestinienne et arabe, ont publié une déclaration exhortant les entreprises technologiques à respecter les droits numériques des Palestiniens pendant la guerre en cours.

« Nous sommes préoccupés par la censure disproportionnée des voix palestiniennes par le biais de suppressions de contenu et de la dissimulation de hashtags, entre autres violations », indique le communiqué.

L’organisation a recensé 238 cas de censure pro-palestinienne, principalement sur Facebook et Instagram. Il s’agit notamment de retraits de contenus et de restrictions de comptes.

« Ces restrictions imposées aux militants, à la société civile et aux défenseurs des droits de l’homme représentent une grave menace pour la liberté d’expression, l’accès à l’information et la liberté de réunion » poursuit le communiqué.

En juillet, l’Union européenne avait déjà adopté une loi sur les services numériques, qui vise à dompter les grandes entreprises technologiques. En vertu de cette réglementation, les plateformes de réseaux sociaux sont tenues de se conformer à des règles qui garantissent la sécurité numérique et préservent la liberté d’expression des utilisateurs.

TRT Français et agences